La relative difficulté d'accès de la langue grecque présent dans le texte littéraire de car le pensé et l'être sont une même chose... contribue à un certain hermétisme qui renforce l'aspect rituel de l'oeuvre, bien qu'il ne soit particulièrement fait de mystère sur l'origine de ce texte (il s'agit de fragments du poème philosophique de Parménide). La sonorité de cette langue ancienne ainsi qu./...
La relative difficulté d'accès de la langue grecque présent dans le texte littéraire de car le pensé et l'être sont une même chose... contribue à un certain hermétisme qui renforce l'aspect rituel de l'oeuvre, bien qu'il ne soit particulièrement fait de mystère sur l'origine de ce texte (il s'agit de fragments du poème philosophique de Parménide). La sonorité de cette langue ancienne ainsi que les percussions que doivent actionner chacun des six solistes vocaux vont clairement dans ce sens. Là encore, bien que certains passages importants apparaissent sous forme parlée, il n'est pas rare que le texte, réflexion philosophique qui atteste de l'émergence au VIe siècle avant notre ère du concept de l'être, ne soit occulté par son traitement polyphonique ou par sa dislocation phonétique. Certaines caractéristiques de l'écriture vocale propre à Michael Jarrell sont observables, notamment les digressions onomatopéiques ou la présence de textures contrapuntiques, mais on trouve également des pratiques telles que le canon verbal (lettre J), ou encore un procédé de condensation du texte consistant à faire prononcer simultanément plusieurs de ses syllabes (mes. 23 et 41 par exemple). On peut noter en outre un travail particulièrement fin quant à l'orchestration des voix, avec un souci manifeste des relais et de la combinaison des attaques. A la fin de la pièce, la phrase centrale du texte de Parménide (car le pensé...) se détache, isolée par un silence d'environ quatre secondes, dans un environnement très léger de percussions qui suggère par des rebonds de vitesses différentes un effet d'apesanteur particulièrement réussi. ...car le pensé correspond pour le compositeur à une période où il était particulièrement concentré sur des pièces virtuoses. C'est le besoin de rompre momentanément avec cette orientation de son écriture qui l'amène alors à s'interroger sur les modalités d'un autre temps musical. La dimension rituelle, accentuée dans la présente version par les percussions confiées aux chanteurs - il existe une version antérieure avec nonette instrumental - était sans doute le meilleur moyen d'y parvenir - elle favorise ici un discours structuré en courtes séquences dont l'enchaînement est souvent souligné par le jeu des percussions. Le temple block et les tam-tams ont un rôle important, l'un pour les attaques et le marquage temporel de l'origine, les autres pour leur modèle acoustique très prégnant (une longue résonance avec des modifications de timbres) auquel se conforme souvent l'écriture de la résonance des voix. Le tam-tam compense par sa diffusion omnidirectionnelle et donc par la sensation d'espace à laquelle il est lié la localisation ponctuelle des voix. Les diapasons, prolongés par des bongos faisant office de résonateurs, symbolisent l'idée de pureté, l'origine de la musique. - Pierre Rigaudière, - extrait du livret du disque Music for a While (aeon). Enregistrement: 1 CD aeon, AE0531, Music for a While - Music for a While - Formes-Fragments IIb - ...car le pensé et l'être sont une même chose - Essaims-Cribles - Ensemble Klangforum Wien, Neue vocalsolisten Struttgart, Ernesto Molinari, Emilio Pomarico --- Nombre de pages : 11 --- Date de parution : 01/01/2002